
Confronté à une recrudescence alarmante du paludisme, Djibouti a lancé une initiative novatrice en mai 2024 en relâchant des moustiques génétiquement modifiés pour lutter contre cette maladie dévastatrice.
Une stratégie innovante contre le paludisme
En collaboration avec la société britannique Oxitec, Djibouti a introduit des moustiques mâles Anophelesstephensi génétiquement modifiés.Ces moustiques sont conçus pour transmettre un gène spécifique qui empêche leurs descendantes femelles, principales vectrices du paludisme, d’atteindre l’âge adulte.Cette approche vise à réduire significativement la population de moustiques capables de transmettre le parasite responsable du paludisme.
Déploiement progressif et perspectives
Le programme a débuté avec le lâcher de 40 000 moustiques en mai 2024, suivi de relâchements hebdomadaires depuis octobre, prévus jusqu’en avril 2025.
L’espèce Anophelesstephensi, originaire d’Asie, a été détectée à Djibouti en 2012. Sa présence a entraîné une augmentation exponentielle des cas de paludisme, passant de 27 en 2012 à plus de 70 000 en 2020.Ce moustique urbain, résistant aux insecticides et actif en début de soirée, échappe aux méthodes de prévention traditionnelles comme les moustiquaires imprégnées.
Un espoir pour l’Afrique
Si cette initiative s’avère efficace, elle pourrait servir de modèle pour d’autres pays africains confrontés à la propagation de Anophelesstephensi. La lutte contre le paludisme dépasse les frontières de Djibouti caren Éthiopie voisine, le nombre de cas a explosé et est passé de 4,1 millions en 2023 à 7,3 millions en 2024. Si l’expérience djiboutienne réussie, elle pourrait offrir une solution durable à une entière région confrontée à cette menace persistante.
En adoptant cette approche biotechnologique innovante, Djibouti se positionne à l’avant-garde de la lutte contre le paludisme, offrant un nouvel espoir dans la bataille contre cette maladie qui continue de faire des ravages en Afrique.Le pays envisage également la construction d’une usine dédiée à la production de ces moustiques modifiés, avec l’ambition de fournir cette technologie à l’ensemble du continent africain.
L’inquiétude des défenseurs de l’environnement
Les résultats du programme pilote de Djibouti sont attendus mi-2025. Mais cette expérimentation inquiète. En effet, l’ONG GeneWatch UK a averti dans un rapport daté de 2019 que cette technologie risquait de « modifier, de manière potentiellement dangereuse, l’évolution des moustiques et la manière dont les maladies se propagent ».
Selon l’association, la méthode n’est en outre pas prouvée : « des femelles pourraient se trouver parmi les mâles relâchés ou mener à ce que les moustiques sauvages migrent vers des régions voisines ».La société Oxitec veut rassurer, affirmant que le moustique qu’elle développe est « complètement inoffensif et non toxique ».
L’Organisation mondiale de la santé a déjà mis en garde contre la menace que représente ce moustique pour les zones urbaines du continent, où vivent des millions de personnes vulnérables au paludisme.
Mais, par ailleurs, « si les insectes doivent être relâchés en continu pour être efficaces, la question du coût se pose ». Un sujet sur lequel l’entreprise a refusé de communiquer.