Attaque meurtrière à Hanruka : une famille afar massacrée dans son sommeil

Hanruka (Afar), 7 août 2025 — La nuit du 6 au 7 août a été celle de l’horreur absolue pour le petit village pastoral de Hanruka, en zone 3 de la région Afar, à l’est de l’Éthiopie. Alors que la communauté dormait, des hommes armés, identifiés par les rescapés comme des miliciens somaliens-issa, ont pénétré dans l’enceinte d’une habitation. Armés de machettes, ils ont massacré le père, la mère et deux de leurs enfants, tous pris dans leur sommeil. Une troisième enfant, grièvement blessée, lutte encore pour sa vie à l’hôpital régional.

Les témoins décrivent une scène insoutenable : corps mutilés, visages méconnaissables, blessures infligées avec acharnement. Le choix de frapper au cœur de la nuit, d’abattre des enfants endormis, porte la marque d’une volonté délibérée de terroriser. Selon plusieurs spécialistes du droit international, un tel acte constitue, à la lumière des Conventions de Genève, un crime de guerre et un crime contre l’humanité.

Un théâtre ancien de tensions territoriales

Hanruka n’est pas un village anodin. Situé à la lisière de la frontière administrative entre les régions Afar et Somali, il se trouve dans une zone historiquement disputée. Ces terres pastorales, riches en points d’eau et en pâturages stratégiques, sont l’objet de convoitises répétées. Depuis plusieurs années, la région Somali revendique l’extension de ses frontières aux dépens des territoires afars. Ces tensions se traduisent par des affrontements récurrents entre communautés pastorales. Derrière ces violences locales se profilent des enjeux politiques plus larges : équilibre fragile au sein de la fédération éthiopienne, rivalités régionales, et influences extérieures. Nombre d’analystes pointent le rôle ambigu joué par certaines forces politiques de la région Somali, accusées de soutenir ou de tolérer ces milices.

Un accord de paix vidé de sa substance

En 2024,  le gouvernement fédéral avait annoncé un accord de cessation des hostilités entre les régions Afar et Somali. Sur le papier, cet accord devait mettre fin aux incursions armées et garantir la sécurité des populations frontalières. Dans les faits, la violence n’a pas cessé — elle s’est même intensifiée.

Selon l’Afar Human Rights Organization, depuis la signature de cet accord, plus de 2 000 têtes de bétail ont été volées et 87 civils afars ont été tués dans des attaques similaires. Le massacre de Hanruka s’inscrit donc dans une continuité meurtrière qui révèle l’échec — ou le refus — des autorités d’Addis-Abeba de protéger les civils.

Le silence coupable d’Addis-Abeba

À ce jour, aucune déclaration officielle du gouvernement fédéral. Ce mutisme renforce le sentiment d’abandon ressenti par les Afars et soulève des interrogations sur l’égalité de traitement des crises intercommunautaires. Plusieurs observateurs estiment que le pouvoir central, soucieux de préserver un fragile équilibre politique, hésite à affronter directement la région Somali, considérée comme bénéficiant d’appuis diplomatiques et militaires du gouvernement djiboutien.

Cette prudence, perçue comme de la complaisance, risque d’être interprétée par les milices comme un feu vert implicite.

Le danger d’un engrenage irréversible

L’histoire récente de la région est jalonnée de cycles de représailles qui, une fois déclenchés, deviennent difficilement contrôlables. Sans action ferme, juridiquement encadrée et politiquement assumée, l’attaque de Hanruka pourrait être l’étincelle qui rallume une guerre ouverte entre communautés.

Ce qui s’est passé à Hanruka est l’expression brutale d’un système de violences tolérées, où l’inaction des autorités vaut complicité tacite. Tant que les criminels sauront qu’ils peuvent éventrer un enfant endormi sans craindre la justice, la paix restera un mot vide de sens.      

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